Wednesday 21 November 2012

Botox or not Botox, that is the question!

Jusqu’à récemment,  j’avais toujours associé Botox avec vanité, peur du vieillissement naturel et chirurgie plastique.  J’étais loin de penser, malgré l’approche de la quarantaine, qu’un jour je serais amener à considérer  son emploi pour mon besoin personnel.
Ce ne sont pas les rides naissantes qui me motivent mais les craintes et contraintes qu’impose  l’incontinence due à ma SEP.
Voilà encore un symptôme caché de la SEP, qui,  de part son tabou, grignote confiance en soi et devient vite une obsession de la logistique :  quand trouverai-je des toilettes ?, ou se situent les toilettes ?, les toilettes seront-elles accessibles ?, dois-je amener une tenue de rechange quand je quitte la maison, même pour une heure ? combien ai-je bu de liquide ? Combien de temps durera le trajet ?...etc
Tous ceux qui ont des problèmes de continence comprendront ces questions qui hantent le quotidien.


La SEP et mal fonctionnement de la vessie
Chacun de nos reins est relié à la vessie, notre ballon de stockage, par un uretère, sorte de tuyau d’écoulement de l’urine. De la vessie, l’urine s’écoule vers l’extérieur  par l’urètre.  Celui-ci  est fermé par le sphincter externe, une sorte de porte qui évite l’écoulement constant de l’urine.  Lorsque la vessie est pleine, on sent le besoin d’uriner.  Il faut alors consciemment relâcher le sphincter externe, ce qui entraine une contraction automatique du muscle vésical.  Ce processus qui nous semble automatique et très simple exige pourtant une très bonne coordination entre le sphincter et le muscle vesical.
Avec la SEP, une plaque peut atteindre les nerfs qui communiquent avec la vessie et le sphincter et perturber leur bon fonctionnement.
Dans mon cas, ma vessie se remplie mais je ne ressens pas le besoin d’uriner ou je ressens le besoin mais je n’arrive pas à relâcher le sphincter.  La sensation est surprenante puisque j’ai vraiment l’impression de ne plus savoir ouvrir le robinet même en me concentrant comme sur un exercice très difficile. 
L'auto-sondage
Pour m’aider à gérer ce problème et éviter des complications rénales irréversibles , mon infirmière spécialisée et mon neurologue m’avaient prescrit un auto sondage urinaire.  Uriner n’était plus laisser au hasard !  J’introduis une sonde dans l’urètre d’où ma vessie se vide et fais ceci toutes les deux/trois heures.   Job done !  Aussi simple que se brosser les dents trois fois par jour.
Malheureusement, depuis 18 mois, un autre problème est venu s’ajouter au tableau.  Ma vessie est devenue super active et j’ai maintenant des problèmes d’urgence urinaire, avec en général 10 secondes entre réception du message de besoin d’uriner et l’accident ! Et ça, ça bouffe de la confiance en soi, croyez moi. 
La solution Botox
Après avoir essayé sans grand succès les traitements médicamenteux Toviaz et Vesicare, mon uro-gynécologue me propose maintenant des injections de Botulinum toxin, plus simplement connu sous le nom Botox.  Evidemment ceci m’obligera à m’auto-sonder à vie mais plus d’accident !

Si j’ai décidé de partager ces problèmes là, c’est parce que l’incontinence est un sujet encore tabou, une honte que l’on enfouie le plus profondément possible et un sujet que n’osent pas aborder nos proches malgré les questions qu’ils peuvent se poser.

Wednesday 12 September 2012

Adapter ses passions à ses besoins

J’avais 6 ans quand ma grand-mère m’a octroyé une petite portion de notre potager familial.  De ce moment solennel de responsabilités au cours duquel je réalisai que je tenais en main ce bout de terre à organiser selon mes idées, pour lequel j’allais pouvoir choisir mes semences et enfin regarder la nature y faire son travail, je sentais déjà un certain  sens d’accomplissement et la fierté à venir devant mes récoltes.
De là vient ma passion pour la terre et son travail, toujours émerveillée par le miracle qu’opère la nature avec un petit peu soin et de patience.  Vivant depuis 20 ans à Belfast sans jardin assez grand pour un potager, j’ai cependant toujours fait preuve d’ingénuité pour trouver un moyen de créer de petits espaces, dans des pots, ou jardinières pour y faire pousser radis, carottes, poivrons, fraises, salades et herbes aromatiques, au plus grand plaisir de ma grand-mère.  Cette complicité de jardinières nous a tenues rapprochées jusqu'à cette année malgré la grande distance qui nous séparait.  Mamie prenait plaisir à m’entendre au téléphone parler de mes semences et de mes récoltes, de mes légumes et de mes fleurs et riait en me disant qu’après elle, j’étais la dernière paysanne de la famille.
Il y a 4 ans de cela, au cours d’une de mes sorties de Geocaching,  j’ai eu la chance de faire une rencontre providentielle avec un Ranger du National Trust.  En discutant, il m’a parlé d’un de leurs projets en cours de développement et m’a tout de suite emmenée voir ce nouveau jardin communautaire sur les terres du National Trust en périphérie de Belfast.  J’en suis repartie avec la clé du portail et de la cabane à outils ainsi qu’avec un petit lopin de terre à mon nom.  Faire partie de Minnowburn Community Allotment a tout simplement révolutionné notre vie.

Minnowburn Community Allotment
Cet espace rural et  sa communauté de jardiniers m’ont tout simplement motivée à rester active malgré la maladie et mon handicap grandissant.  Ensemble, nous avons maximisé notre potentiel et réalisé de nombreux projets pour améliorer nos espaces communs, notamment notre serre, nos jardins de plantes aromatiques, notre verger, la construction d’un four à pain…etc.   Chacun met à la disposition du groupe ses compétences et du temps libre.  Ainsi, malgré mes limitations physiques, j’ai moi aussi trouvé ma place dans cette communauté dynamique. 
En ce qui concerne mon potager, mes méthodes de travail ont du évoluer avec mon handicap et mon état d’esprit.   Pourquoi m’entêter à passer par la souffrance pour continuer à profiter d’une de mes activités préférées ?   Après deux années passées à bêcher à genoux, il était impératif d’adapter mon jardin à mes besoins.  Ensemble nous avons réfléchi à la problématique et discuté des possibilités d’adaptations. 
Mais c’est en lisant le livre de Sepp Holzer sur la permaculture que j’ai trouvé mon inspiration pour la réalisation de mon parterre surélevé.   Avec l’aide de notre équipe, nous avons d’abord creusé mon parterre existant, déposé une première couche de bois mort, ensuite couvert d’une couche de gazon, herbe en dessous, terre au dessus, mis une légère couche de crottin de cheval, recouvert le tout de compost et fini par une couche de terre.  Outre l’aisance que m’apporte ce parterre surélevé et en forme pyramidale pour jardiner et récolter mes légumes assise, ce nouveau lopin de terre se révèle super productif.  Quel plaisir d’aller récolter betteraves, carottes, courgettes, salades, radis, haricots et petits pois sans avoir à me trainer dans la terre ! 

Comme d’autres malades abrutis par la SEP et le handicap, j’ai d’abord pensé qu’il me faudrait abandonner  bon nombre de mes activités et passions dont je tirais bonheur et équilibre.  Je comprends maintenant qu’il me faut accepter de faire les choses différemment et en mon temps, savoir adapter mon environnement, choisir des outils adaptés à mes nouveaux besoins, accepter l’aide offerte généreusement et persévérer toujours en suivant le changement.

Mon seul regret est de ne plus pouvoir raconter mes petites victoires de jardinière à ma grand-mère.

Friday 27 July 2012

Quand la SEP tient la chandelle!

Toute maladie débilitante, la SEP n’est pas une exception, affecte non seulement la personne malade mais impacte aussi lourdement sur la vie de la famille, la vie du couple et change souvent la dynamique dans les relations avec ses proches. 

Un dialogue franc et tolérant est essentiel pour instaurer un climat de confiance où chacun puisse se sentir libre d’exprimer son ressenti, ses angoisses, ses doutes ainsi que sa colère face à la maladie et le handicap sans pour autant se culpabiliser ou essayer de protéger l’autre coute que coute.

Dans mon couple, nous vivons désormais à trois, Emma, la SEP et moi.


Dans les premiers temps, nous avons eu toutes les deux la même attitude :  on dit merde à la maladie et on n’y pense plus.  Petit à petit, la peur qui s’installe pendant ces longs mois durant lesquels on ne sait pas quel sera le diagnostique, cette peur se matérialise individuellement et parfois différemment.  

De mon coté, je préfère ignorer l’épée de Damoclès qui pèse pourtant lourdement, la vie continue, tout reviendra dans l’ordre bientot... et je remets ma confiance dans les mains des spécialistes. 

Emma, elle, a besoin d’une cible pour sa colère.  Sa frustration par rapport à l’absence de certitudes quant à ma maladie, se tranforme en colère contre la lenteur du système de santé et notre long calvaire vers un diagnostique.  Sa vie à elle aussi bascule, et pourtant la maladie joue l’intrus, l’exclue et la garde à distance.  Dans cette nouvelle relation,  elle ne peut rien face à ma douleur, elle ne peut pas la faire disparaitre ou la rendre moindre.  C’est un terrible sentiment d’impuissance.  La seule facon pour elle de se rapprocher de mon vécu et me protéger, est en quelle que sorte la substitution de sa bataille virtuelle avec la SEP par une bataille physique avec le corps médical pour faire avancer les choses et obtenir le traitement miracle...tout ira bien dans le meilleur des mondes !

Il nous est parfois impossible de minimaliser la distance qui nous sépare.  De mon coté, je culpabilise d'avoir introduit la SEP dans notre couple, dans notre vie.  Comme pour me racheter, je sacrifie toute mon énergie pour assurer le bon déroulement de notre quotidien, en faisant tout mon possible pour qu'Emma ne puisse percevoir le moindre changement.  L'épuisement qui en découle et voit bien souvent l'apparition de nouveaux symptômes, à son tour entraine un sentiment de culpabilité chez Emma.  Elle se sent alors minable et pas assez à la hauteur.  Cette négativité grandit à mesure de notre silence et prend des proportions parfois étouffantes.  Il nous reste alors à percer l'abcès pour communiquer enfin l'essentiel, le vrai message du cœur.

Il faut que je me fasse une raison.  Emma est en droit d'être furieuse contre la SEP. Mais vivant en cohabitation forcée avec la maladie, je n’ai pas le loisir de pouvoir me dissocier de la SEP et donc je me mets vite sur la défensive en me sentant attaquée personnellement par sa colère.  Ce genre de malentendus peut être difficile à vivre au quotidien et teste le plus solide des couples.

La fatigue, symptôme silencieux de la SEP entraine une difficulté à gérer les humeurs ou bien la concentration.  Souvent il m’arrive être aussi inanimée qu’un bout plastic.  Je n’ai aucune pensée, aucun sentiment…je suis un mur !  Il est alors difficile pour ceux qui m’entourent de comprendre ce changement de comportement sans se demander si je déprime ou fais la tête ou bien simplement manque de compassion.

Outre ces problèmes de communication, la SEP a plutôt tendance à casser l'ambiance quand il s'agit de baisser la lumière, mettre de la musique douce et de se retrouver intimement...au son de Let's get it onD’un coté, le manque de sensations dans certaines parties du corps, de l’autre un manque de coordination et de dextérité de mes membres, accompagnez tout ça par des douleurs neurogènes qui souvent s’expriment par de violents spasmes musculaires...et vous pouvez facilement imaginer la recette catastrophique pour un couple ne demandant qu’à passer un moment de plaisir ensemble !  Heureusement, armée d’humour, on peut tout surmonter dans la bonne humeur.

Dans mes relations avec mes amis, la SEP a énormément changé notre dynamique.  Je ne prévois rien longtemps à l’avance et décommande souvent à la dernière minute.  Les conversations téléphoniques m’épuisent, mes amis parlent donc plus souvent avec mon répondeur qu’avec moi-même.  Pour eux aussi, il a été difficile de voir apparaitre certains changements.  Ce n’est pas simple de se sentir en phase avec le handicap des autres.  Les conversations sont piégées de tabous que certains évitent faute de savoir comment les affronter. 

J’étais récemment à une soirée d’anniversaire d’une de mes meilleures amies.  Certains de ses invités me connaissent depuis longtemps sans pour autant entretenir avec moi une relation proche.  Mon entrée au restaurant en chaise roulante fit donc tomber un silence glacial sur notre petit groupe.  Certains ne pouvaient même pas me regarder dans les yeux ne pouvant cacher leur panique à l’idée de ne pas savoir quoi dire…comme... un simple bonjour, comment ça va ?  Ce n’est que plusieurs heures et pour certains, quelques verres de vin plus tard qu’une de ces personnes m’a approchée en s’exclamant : « What the fuck is it with the wheelchair Muriel ! »  Il ne comprenait pas que personne ne m’ait demandée ce qui m’était arrivée alors que 6 ans plus tôt nous skiions régulièrement ensemble.  La réaction des autres est imprévisible mais toujours pardonnable une fois comprise.


Quant à la famille, la peur les hante et les ronge.  Les discussions sont difficiles.  Chacun veut faire de son mieux et en son possible pour me protéger et en même temps soulever leur propre montagne d’impuissance face à mon handicap grandissant.

Il n’y a rien de mal à  avoir besoin d’exprimer tous ces ressentis différents.  Il n’y a pas non de plus de mal à vouloir accepter la maladie telle quelle et d’essayer de s’en faire une amie.


Pour les conjoints, lire les differents articles sur le site Sclerose-en-plaques de l'APF qui traitent de l'impact qu'a la SEP sur le couple, dont la fiche "La SEP dans le couple:  en equilibre sur le fil de l'amour"

Thursday 5 July 2012

Ma compagne la douleur

Bon nombre sont ceux qui feraient n’importe quoi pour étouffer la plus infime douleur.  Nous sommes une société qui, ne supportant pas la moindre souffrance, a pris l’habitude de consommer aspirine et paracétamol comme des bonbons.  Pourtant, la douleur peut être une bonne amie puisqu'elle sert en quelque sorte de sonnette d'alarme prévenant d’un danger immédiat ou de maux plus profonds.

La SEP complique un peu les choses.  En effet, l‘attaque de la myéline, sorte de couche isolante des nerfs se manifeste par des plaques d’inflammation dans le cerveau et la colonne vertébrale.  Ces plaques entrainent une mauvaise transmission entre le cerveau et le reste du corps.  Les messages peuvent être faux ou interrompus causant disfonctionnements et troubles de sensation.  Les douleurs neurogènes qui en découlent, vont d’une simple irritation, des sensations de fourmillement à des sensations de brulure intense ou  des décharges électriques violentes. 

Mon expérience de la douleur neurogène continue est ciblée sur mes pieds et jambes, mes bras et mes mains et le coté droit du visage.  Cette douleur se manifeste par des sensations de brulures intenses et des sensations de vibration et fourmillement. Au début de la maladie, j’essayais coûte que coûte de bloquer la douleur, dépensant toute mon énergie à ignorer ces sensations pour finalement ne penser qu’à ça.

Maintenant, je cohabite avec la douleur, je l’accepte et je l’écoute.  Quand mon œil droit me fait souffrir, je sais que je dois ralentir et me reposer. Ainsi certaines de mes douleurs me servent de baromètre. Si je gère ma fatigue, c’est pour pouvoir accepter la douleur continue sans frustration et colère grandissante.

Les spasmes musculaires restent mes pires ennemis car ils me paralysent de leurs décharges électriques.  Mes chutes fréquentes leur sont dues et petit à petit grignotent de  ma confiance en moi.  Mes difficultés de déplacement à la marche et le manque d’équilibre sont ainsi dues aussi bien au dysfonctionnement du système nerveux qu’à la douleur dans mes membres et aux mauvaises habitudes prises pour compenser le manque de sensation dans les pieds et jambes.

A ces douleurs neurogènes s’ajoutent des douleurs musculaires.  Vivre avec la SEP est éprouvant pour tout le corps.  Certains muscles, tendons, articulations sont amenés à travailler deux fois plus pour compenser le mauvais fonctionnement d’autres groupes de muscles et articulations.  C’est un « burn out » au quotidien !

La spasticité, symptôme significatif de la SEP, se manifeste par une raideur et contracture des muscles.  Depuis plus d’un an, les muscles de ma cage thoracique sont constamment contractés et me donnent l’impression d’étouffer dans un corset deux tailles trop petites.  Régulièrement ce sont les muscles de mes jambes et bras qui se raidissent.  Tout mouvement devient extrêmement pénible et douloureux.

Chaque expérience de la douleur est tout à fait individuelle mais je crois que la meilleure manière d’aborder la douleur est de l’accepter et d’essayer de cohabiter.  Mon approche reste très holistique, combinant la méditation, l’aromathérapie aux massages musculaires.  Cependant, la nuit, quand mon inconscient refuse la douleur et les spasmes violents, je m’arme de médicaments contre les douleurs neuropathiques et musculaires pour me permettre de dormir.

C’est un tableau peu réjouissant certes, mais je découvre chaque jour un peu plus la capacité incroyable du corps humain à assimiler et normaliser aujourd’hui ce qui, hier, paraissait intolérable.

Thursday 21 June 2012

Garder la forme malgré le handicap

Avec l’Euro 2012 de football en cours, Wimbledon et les Jeux Olympiques à l’horizon, je sens le besoin de faire partager mon régime forme et tonicité avec d’autres,  qui comme moi doivent se sentir limités et résignés à ne plus pouvoir  participer à des activités sportives.  Avant la SEP, je pratiquais énormément de sports, dont le waterpolo et le football. 
L’année dernière, entre deux poussées, l’envie de reprendre le sport et le gain de surpoids m’ont amenée à rechercher les possibilités de pratiquer un handisport.  Le choix s’est limité au basketball en chaise roulante, au tennis ou la voile.  Ne pouvant accéder à aucun de ces clubs facilement sans avoir un chauffeur pour m’y accompagner, j’avais vite baissé les bras.
Mon passage en centre de rééducation en Décembre m’a fait réaliser à quel point il est impératif que je me prenne en charge moi-même.  La kiné est un soutien hebdomadaire qui ne peut pas faire de miracle si je ne me prends pas en main chaque jour sans exception. 
A ne pas exercer ses articulations et muscles, surtout ceux qui ne répondent pas bien ou qui ne reçoivent plus les messages transmis par le cerveau automatiquement, on laisse le handicap se développer encore plus rapidement.  Ainsi, n’ayant que très peu de sensation dans la jambe et le pied droits, j’avais pris la mauvaise habitude de trainer la jambe en m’appuyant de façon très prononcée sur mon rollator ou mes cannes.  Ma kiné spécialisée m’a vite démontré les conséquences de cette mauvaise habitude.   Ma hanche et ma cheville ne fonctionnaient plus normalement, les articulations ayant perdu leur capacité d’extension.  Je nourrissais moi-même mes difficultés de mouvement.
Aidée de ma neuro-kiné et d’une amie qui enseigne le yoga, j’ai conçu un programme quotidien d’exercices et d’étirements pour lutter contre la spasticité de mes muscles et pour garder mes articulations bien huilées.  J’y ai incorporé des éléments de musculation ainsi que des segments cardio.  Tout ce programme je le fais assise ou allongée, preuve que l’on peut transpirer autant sur une chaise roulante que sur ses deux pieds !
Je me suis aussi inspirée de deux DVDs d’exercices dynamiques pour malades de la SEP conçus par MS Society et par le MS Trust.
Chaque matin, avant le petit-déjeuner, j’installe mon tapis de yoga dans le salon où rayonne le soleil matinal et je complète mon programme en 40 minutes.  En quels mois, je me suis remusclée les bras, les épaules, le dos et surtout les abdominaux.  J’ai retrouvé de la flexibilité de mouvements dans les jambes, le bassin et la colonne vertébrale.   Le travail effectué au niveau des abdominaux a aussi eu un impact positif sur mes problèmes de continence.
Le seul élément négatif de ce régime forme, c’est que je trouve difficile de me motiver chaque matin quand les douleurs neuropathiques sont avec moi dès le réveil.  Alors depuis 6 semaines, j’ai rejoins une classe de fitness pour  malades de la SEP, organisée par MS Society en partenariat avec le Comité des Sports d’Irlande du Nord.  Pendant 1h 30 chaque mercredi midi, je me joins à six autres personnes, maintenant devenus des amis, et sur des rythmes musicaux entrainants nous suivons les instructions et démonstrations de deux coaches spécialisés. 
C’est un bol de bonne humeur et de tonicité que je ne peux que recommander !  Prenez contact avec les associations de soutien des malades de la SEP près de chez vous.  Peut-être existe-t-il des initiatives similaires.

Tuesday 22 May 2012

Recherche Muriel désespérément

Me voila à ma cinquième infusion de Tysabri et bien qu’il n’y ait aucun miracle, que je n’attendais d’ailleurs pas, mon état semble enfin se stabiliser.  Le seul nouveau symptôme récent est une douleur aigüe dans l’avant bras droit qui se fait sentir plusieurs fois par jour.  Celle-ci est précédée d’un spasme incontrôlable qui me fait lâcher prise à chaque fois.  Il y a donc de la casse de vaisselle, des accidents avec boissons chaudes et froides et la bavette serait bien utile à l’heure des repas !
Cette phase de plateau arrive au bon moment car il me faut affronter deux nouvelles difficiles à digérer.  La première vient du changement de mon diagnostique neurologique.  Je viens de passer dans la catégorie supérieure, ou plutôt celle en pente descendante !  Pas de quoi se réjouir.  Je suis maintenant dans la catégorie de la SEP progressive secondaire.  Je ne passerai plus par des périodes de remissions entre poussées.  Il n’y aura qu’une deterioration progressive et donc un handicap grandissant.  Cependant, ce diagnostique met fin à mes inquiétudes des 10 derniers mois.  Je sais maintenant pourquoi la rémission tant attendue ne se matérialisait pas.  J’en étais venue à culpabiliser de ne pas aller mieux.  Ceci y met donc court.

La deuxième sombre nouvelle est qu’il va falloir que j’arrête de travailler.  Bon, il est vrai qu’étant en arrêt depuis Aout, cela ne s’annonçait pas comme un réel choc.  Cependant, j’avais un peu bloqué toutes idées connectées de loin ou de près à mon travail.  Je dois rencontrer ma DRH et ma boss dans deux semaines pour discuter de mon décommissionnement incontournable après bientôt un an d’arrêt.
Qu’est ce qu’on fait quand on est retraitée à 38 ans et qu’on fatigue plus vite qu’un octogénaire ?  Retraitée ? en fin d’activité ? femme au foyer ? en incapacité  de travail ? en longue maladie ? Quelle étiquette vais-je donc pouvoir donner à ma nouvelle identité ?
Cette maladie est un vrai changement de programme !  Je ne suis pas prête pour cette vie sans travail, sans l’ambition de pouvoir développer ma carrière, de progresser en complétant mon portefeuille de compétences…etc. Je m’amuse assez de la situation car étant coach de carrière/mobilité, je travaillais depuis plus de trois ans avec des personnes dans une situation similaires à la mienne.  Il me parait maintenant flagrant que le travail personnel de se recréer une identité et des repères est bien moins facile que d’être à l’écoute et  d’apporter mon soutien à un client dans sa recherche et sa définition de nouveaux objectifs de vie. 
Je dois avouer que le manque de repères, l’absence d’un modèle positif à suivre  alors que j’essaie de façonner un moi qui colle à mes circonstances autant qu’à mes aspirations, est la réelle problématique.
J’ai l’impression d’avoir passé ma vie sans prendre le temps de me poser les bonnes questions.  Quand on est sur la grande roue à piétiner pour continuer de la faire tourner, on ne s’arrête pas pour se demander si on va dans la bonne direction.  Seuls la chute et le dérapage nous poussent à la réflexion.  C’est le temps pour moi de faire le bilan.  Quels sont les paramètres nécessaires à prendre en compte ?  Quelles sont mes aspirations ?  Quelles sont mes capacités à exploiter ? Il y a t-ils des opportunités qui s’offrent à moi ? Qu’ai-je envie de partager avec les autres ?  Comment continuer à être moi-même avec ces nouveaux paramètres ?
La recherche a commencé…

Tuesday 24 April 2012

L’ennemi invisible



 J’ai depuis toujours le sens et j’écoute la résonance des deux voix différentes qui animent mon esprit ;  l’une est source de confiance en moi, de force, de créativité, de passion et d’optimisme à toute épreuve ; l’autre tremble dans son coin de la peur de l’échec, de la honte, de la faiblesse, une voix qui se veut critique, conforme à la norme et qui m’abasourdit pour rester toute petite dans mon coin, limitée par la peur de ne jamais atteindre mon potentiel.  Ces deux voix s’engagent chaque jour dans d’incessants combats de rhétorique pour décider de qui aura le dessus.
Depuis le tout début de ma SEP, j’ai ressenti une troisième voix, une présence qui s’est installée et a pris ses aises en jouant des coudes.  Cette présence là habite tout mon corps, pas seulement mon esprit.  Ce monstre de l’ombre, c’est la fatigue caractéristique de la SEP, pas la fatigue de monsieur-tout-le-monde, la fatigue vécue au quotidien par chacun.  Cette fatigue ralentit chacun de mes gestes, elle alourdit mes jambes à chaque pas jusqu'à ce que je ne puisse plus les bouger.  Elle m’empêche de concentrer mon attention sur une conversation, une lecture, une activité quelconque de façon soutenue.  Elle crée des murailles au plus profond de moi qui font obstacles au ressenti, aux sentiments, aux émotions, jusqu'à ce que les personnes qui m’entourent ne comprennent plus les raisons de mon détachement et de ma froideur.
Pendant les premières années de ma maladie, j’ai su appliquer de façon intransigeante ma première règle de vie : « si tu veux, tu peux ! », l’esprit dompte le corps.  Je me suis battue pour vaincre cette fatigue et pousser mes limites coute que coute.  J’en paie maintenant le prix.
Au cours des 8 derniers mois, j’ai enfin pris conscience du fait que je ne peux pas vaincre cette fatigue en lui jetant le peu d’énergie dont je dispose au quotidien.  C’est en effet, le plus grand des gaspillages qui entraine une terrible frustration, qui elle-même me pompe encore plus de mon énergie. 
Comme pour l’eau si précieuse, Je dois donc apprendre à utiliser au mieux mon énergie, en utilisant des moyens et outils d’aide et colmater toutes brèches pour empêcher les fuites.
C’est avec ma neuropsychiatre et mon ergothérapeute que j’ai fait ce cheminement pour d’abord comprendre les mécanismes de la fatigue et ensuite mettre en place les stratégies nécessaires pour vivre au mieux mon quotidien.
Ma neuropsychiatre m’a énormément aidée à  comprendre et mettre en mots mon ressenti par rapport à ma fatigue au quotidien.  En gros, il faut s’imaginer avoir un potentiel d’énergie utilisée pour les besoins de base d’un fonctionnement normal :   
En gros, je ne peux pas continuer à utiliser toute mon énergie pour des dépenses physiques car il ne me reste plus de jus pour gérer mes émotions et utiliser ma matière grise.  Mon ergothérapeute m’a guidée pour élaborer une analyse de mes pics d’énergie au cours de la journée ainsi que de mes grandes baisses de régime.  Ensuite, nous avons pu réaménager mon emploi du temps.
Comme je suis moins harcelée par la fatigue tôt le matin, je passe une heure à faire de la kiné et du yoga, peu importe la douleur ou l’humeur.  Ma toilette me demande beaucoup de temps et d’énergie et une fois habillée, je m’allonge une demi-heure pour récupérer.  Cependant,  je dois toujours rester flexible car certains jours, il m’arrive d’être écrasée par la fatigue au réveil et de ne pas pouvoir me lever, me laver ou m’habiller.
 Le reste de la matinée, je dois choisir entre mes activités : soit Je prépare le diner, je fais quelques tâches ménagères légères, ou je consacre mon reste d’énergie pour faire une brève sortie ou une activite telle qu'écrire ce blog.
Après déjeuner, je m’allonge pendant deux à trois heures pour lire et méditer. Je dors entre 20 et 40 minutes maximum.  J’ai besoin de ce temps pendant lequel je n’ai aucun stimulus pour retrouver des forces pour le reste de la journée.  L’habitude a été difficile à prendre car étant d’un tempérament hyperactif, ce temps de sieste m’a paru longtemps un gaspillage de temps, de la paresse et du laissez aller. 
Le plus pénible pour moi est de réconcilier mes envies d’activités avec mon potentiel d’énergie.
Souvent je commence une activité et tout d’un coup, la fatigue m’abrutit complètement, les maux de tête me donnent le «  casque », la paupière droite tombe et je ne peux plus parler, avancer, penser…etc. J’ai la chance d’avoir une femme et des amis extraordinaires qui comprennent ma maladie, ma fatigue et qui me viennent en aide régulièrement.  Ainsi, il m’arrive de sortir en chaise roulante le matin en pensant être en forme olympique, d’arriver jusqu'à la bibliothèque ou la boucherie du quartier et d’avoir à appeler  à la rescousse car je ne peux pas faire deux mètres de plus.
Les vraies stratégies pour gérer cette fatigue de la SEP se résument en peu de choses :

  • ·         Positiver : le manque d’énergie entraine une baisse de capacité à gérer l’humeur et les émotions. On voit vite les choses en noir alors il faut juste se rappeler que « demain est un nouveau jour avec un nouveau potentiel d’énergie »
    ·         Etre organisé et faire des listes pour aider la mémoire
    ·         Etablir les priorités de la journée
    ·         Dormir un moment dans l’après-midi pour se recharger
    ·         Ecrire un mini journal pour pouvoir reconnaitre que la journée n’a pas été vide malgré les impressions qu’on peut s’en faire.
    ·         Se faire aider à la maison
    ·         Utiliser les outils d’aide au handicap-par exemple,  j’utilise un charriot pour rassembler tous mes ingrédients avant de commencer à cuisiner  et pour chaque activité dans la cuisine, je suis assise sur une chaise haute.
    ·         Eviter le stress
    ·         Faire de l’exercice physique
    ·         Manger bien en petite quantité plus souvent et à des moments de pics d’énergie
    ·         Eviter la chaleur
 Ma vie n’est plus en dents de scie mais en « Cruise Control » et si je ne vis plus les grands hauts, j’espère au moins  ne plus connaitre les grands bas.
    Et je vous laisse avec une vidéo sur la fatigue et la sclérose en plaques accessible sur le site APF de la SEP

    Les symptômes "invisibles" de la sclérose en plaques par le Dr Bruno Stankoff






    Wednesday 29 February 2012

    Qui veut aller loin ménage sa monture.

    J’attendais pourtant ce moment avec une certaine impatience, projetant  bon nombre d’escapades enfin rendues possibles par cette chaise roulante.  Il est vrai que l’attente fait fantasmer de façon peu rationnelle et j’attends tout de même depuis 9 semaines que mon ordonnance se matérialise enfin.  Comme toujours, le NHS est synonyme de longue liste d’attente et j’ai du avoir recours à la Croix Rouge qui prête du matériel médical.

    Le premier jour de ce nouveau partenariat, Emma m’a déposée devant l’hôpital en allant travailler.  Assise, mon petit sac en bandoulière dans le dos de ma chaise, j’ai fait au revoir de la main, ressentant monter en moi une vague de timidité et d’angoisse sorties tout droit de mon enfance, la peur de l’échec  et de la honte.  Pas le choix, je ne peux pas rester coincée entre les portes automatiques de l’entrée de l’hôpital avec le va-et-vient incessant du personnel soignant  et des patients. 
    Roulez jeunesse !
    Quel plaisir ! C’est la première fois depuis trois ans que je me déplace sans douleur et avec une certaine vitesse.  J’arrive à ma salle de traitement toute fière de cette nouvelle liberté et aisance de mouvement. 
    Ce deuxième traitement s’est bien déroulé malgré mon angoisse qu’une crise d’épilepsie ne se déclenche à nouveau.  Je croise les doigts !
    Apres mon traitement, mon amie Shannon m’a rejoint et nous sommes rentrées chez moi en taxi passer le reste de l’après-midi à faire la sieste et à jouer au scrabble. 

    Ce n’est que le lendemain matin que j’ai découvert stupéfaite et plutôt gênée que nous avions oublié un bout de ma monture dans le coffre du taxi. 
    Mon dieu, les choses commençaient bien ! 
    
    WANTED!
    
    J’ai dû lancer un avis de recherche pour mon repose pied en téléphonant à toutes les compagnies de taxi qui prennent régulièrement des passagers devant l’hôpital.  Apres quatre longues heures d’attente près du téléphone, on a pu me confirmer que ma pièce avait été localisée et me serait rendue le soir même.
    
    Remise de mes émotions, j’ai décidé, le lendemain, d’aller en reconnaissance dans mon quartier avec une amie en guise de bras de secours.  Quand on n’a pas besoin de faire attention à son environnement de près, on ne réalise pas à quel point une sortie en chaise roulante peut devenir cauchemardesque à cause d’un trottoir trop élevé, d’une portion d’asphalte défoncée, de voitures stationnées sur le trottoir…etc.  Mon ennemi a pris la forme d’une bosse de ralentissement en bas de ma rue.  Ne pouvant pas circuler sur les trottoirs défoncés de ma rue, j’ai été obligée de circuler sur la chaussée en me demandant si ça m’obligeait à porter un casque comme les cyclistes.  Je n’ai jamais pu remonter la bosse toute seule.  Ma première tentative a fini dans le caniveau, la chaise sur une roue et moi la moitie du corps dans le caniveau, mon postérieur bien ancré dans la chaise. 
    La boune fame avait cheu !  Malgré une honte passagère pendant laquelle on jette des regards furtifs autour de soi, on réalise que l’honneur est toujours sauf !  L’important, c’est de remonter en selle tout de suite pour ne pas donner plus d’ampleur à cette baisse de confiance en soi.  C’est bien sûr toujours plus facile quand on a le soutien d’amis avec qui on peut rire de la situation et diffuser le tout. 
    Il y aura, je n’en doute pas, d’autres chutes et d’autres moments gênants.  Le plus grand obstacle est la peur de l’échec et de la gêne publique.  C’est assez intéressant de réaliser que j’ai plus de mal à surmonter cette peur que de surmonter le handicap au quotidien.

    Thursday 16 February 2012

    Animal Farm

    On ne devrait jamais juger un livre par sa couverture ! J’avais toujours pensé que le milieu hospitalier en France offrait des soins supérieurs à ceux d’Irlande du Nord de par la qualité de l’hébergement :  chambre individuelle avec salle de bain, toilettes, télé…le confort individuel pour plus de repos. 
    Ici, c’est la chambrée mixte ouverte sur couloir, six lits, six chaises, six tables de nuit pour ranger ses effets personnels, six tables-plateaux.  Le seul élément de discrétion offert est un rideau bleu NHS entre les lits que les docteurs et infirmiers tirent à chaque consultation ou en cas de tragédie, lors des derniers souffles d’un patient, offrant un bien mince rempart pour la famille en guise d’intimité.
    Les patients vont et viennent certes, mais au fil des jours, la compassion et sympathie que l’on est amener à ressentir pour ses voisins de lit ainsi que leur famille, se transforme vite en amitié ou à l’inverse en allergie.  Cette chambrée claustrophobe agit telle une cocotte minute :  sous la pression de la vapeur, nous voila fusionnés, telle une équipe de sport convergeant vers la même victoire, la notre, sortir enfin de l’hôpital !
    Ce petit groupe assemblé au hasard est toujours marqué de personnages très distinctifs  et c’est une comédie des mœurs qui se joue devant nous. Sur scène :  le patient qui a tous les maux du monde et raconte en détails les épisodes par lesquels il a eu le malheur de passer.  Il renchérit comme lors d’une partie de poker dès que quelqu’un annonce un nouveau symptôme.  Il a tout eu, tout souffert.   Il y a la femme de la grande bourgeoisie coincée dans sa robe de dignité froissée.   Elle n’est pas du même monde et aurait de loin préféré la tranquillité d’une chambre individuelle.  Elle n’ose pas se changer en vêtements plus confortables et somnole raide et droite dans sa chaise, évitant de croiser le regard de qui que ce soit, comme si elle avait peur d’attraper la maladie des autres.   La sexagénaire, un fichu coloré sur la tête, sortie tout droit de sa campagne a l’air plutôt excitée par  la nouveauté de cet  environnement.  Elle cherche à faire la conversation à tout prix, heureuse d’avoir enfin un auditoire, et elle ne s’arrête plus, pas même pour reprendre sa respiration.  Chaque patient est interrogé sur sa généalogie et chaque détail est indexé et recoupé selon son système de gestion d’information.  Elle connait un cousin d’un cousin de la mère de l’un.  Elle habite le même bled perdu que le grand oncle d’un collègue de l’autre.  Elle a besoin de découvrir ces connections comme si sa vie en dépendait.  Il y a aussi le patient qui observe et participe aux échanges au minimum comme si il faisait parti d’un monde parallèle.
    Ce manque d’intimité et de tranquillité est un salut pour moi ! Je n’ai ni le temps, ni l’espace pour laisser libre court à mes angoisses sur le futur.  Dans un service tel que celui de neurologie, on est face à tant de conditions différentes, toutes aussi plus terrifiantes les unes que les autres, que l’on en vient à se considérer  plus chanceux que bon nombre de patients.  Je crois très sincèrement que l’isolation que l’on institue dans les hôpitaux en France n’est ni bon pour le moral ni bon pour la guérison.  On semble vouloir protéger le patient du regard des autres, hors c’est de là que l’on tire une réelle image de sa propre condition.  Je tire énormément de force du fait que mes voisins de lit ne voient pas tout mon handicap et ne soupçonnent pas la douleur qui m’accapare en permanence.  Ils voient mon sourire et partage ma bonne humeur ce qui me fait oublier moi aussi pourquoi je suis là.  On existe alors en tant que personne dont on connait certains aspects, certains traits de caractère, et non pas en tant que Lit N  3- SEP/Epilepsie.
    Telle une bande de copains, on s’inquiète les uns des autres, on prête son épaule à ceux qui ne peuvent plus contenir leurs larmes.  On se distrait en se racontant des tranches de vie.  On apprend à connaitre la famille des autres, surtout quand celle- là est très présente au chevet d’un malade qui est rarement dans un état conscient.  On se serre les coudes quand le roulement du personnel soignant nous apporte un personnage peu affable ou même carrément patibulaire. 
    Pour les patients peu entourés, cette source d’amitié permet de ne pas affronter un diagnostique abrutissant seul.  On s’écoute les uns les autres, ce qui permet de réfléchir et de digérer les nouveaux bouts d’information donnés sur sa condition.
    C’est une grande victoire sur l’indifférence et l’isolation qui ne coûte pas plus chère au système de santé et qui permet aux malades de se remettre bien plus vite  sur pieds car ils retrouvent l’envie d’aller mieux.

    Wednesday 15 February 2012

    Carpe Diem

    L’amélioration tant attendue ne s’est pas matérialisée, bien au contraire.  Mes dernières tribulations datent de Dimanche 5 Février. 
    Malgré l’expérience que j’ai de ma maladie, je reste souvent dans le flou quand il s’agit de reconnaitre les signes avant-coureurs d’une nouvelle poussée ou ceux de la fatigue extrême, qui s’avère pour moi être le pire symptôme de la SEP, car silencieux et invisible.  Dimanche, je ne me sentais pas moi-même.  Irritable, la tête dans les nuages, ne supportant aucune conversation, je sentais que ma tête était sous pression, un flux constant de sang vers les tempes, l’envie de vomir.  Je suis restée couchée tout l’après-midi en me torturant l’esprit d’avoir une fois de plus gâcher un après-midi  entier.
    Après une soirée très tranquille, diner, télé, tricot…je me suis couchée, la tête embrumée et les oreilles me sifflant en continu.  Le sommeil est venu très vite mais n’est pas resté.  1h du matin et me voila réveillée, retournant dans ma tête mes peurs grandissantes quant à notre vie à trois, Emma, la maladie et moi.
    Je me lève et descends m’installer à la cuisine avec mon journal de bord, bien déterminée à démêler mes inquiétudes et angoisses pour y voir un peu plus clair, plutôt que d’essayer d’affronter de pleine face cette montagne de petits riens accumulés.   Heureusement, Emma, ne pouvant, elle non plus trouver le sommeil, descends me rejoindre.  Nous commençons à discuter et très soudainement, je sens une pression terrible dans la tête et tous les muscles du visage, accompagnée de la nausée.  Je reconnais déjà les sensations annonçant l’évanouissement.
    Je reprends conscience, je suis sous la table de la cuisine, les yeux ne voyant que la pénombre et la résonance qui me perce les oreilles. Et pourtant, je me sens au calme dans une légèreté assez agréable. Je pourrais facilement rester comme ça dans la sérénité, plus de peur, de peine, d’angoisse, de douleur…mais plus de vie, ça serait le pire des maux.
    Etrangement, Emma réalise que je suis à nouveau consciente et moi-même car je dis et redis que je ne veux pas aller à l’hôpital.  Le coté têtu de ma personnalité prévaut une fois de plus !   Pourtant, il n’y a pas de discussion à avoir, je suis bonne pour un baptême en ambulance !  On ne se rend jamais compte de la gravité de la situation, à moins d’être hypochondriaque !
    C’est Emma qui a besoin du soutien du corps médical pour le moment, besoin d’être rassurée sur mon état.  Je m’adapte au changement constant de mon état de façon organique.  Les nouveaux symptômes sont absorbés en quelques jours, et en repensant à ma condition un mois en arrière, deux mois, un an…je me dis que ces symptômes là n’étaient rien, un jeu d’enfant, et pourtant ils avaient changé ma vie à ce moment précis dans le temps, avaient entrainé de l’angoisse, de la peur même pour le futur. 
    Pour ceux qui partagent ma vie, m'accompagnent chaque jour, le moindre trébuchement est vécu comme une chute, un symptôme différent tel une nouvelle étape d’un calvaire qui n’en finit plus et qui les plongent toujours un peu plus profondément dans le doute :  seront-ils capables de s’occuper de moi ? combien de temps nous reste il pour accomplir nos projets, atteindre nos rêves ? 
    Cela dit, ne sont-ce pas les questions que nous devrions tous nous poser au quotidien pour éviter d’oublier que le train-train journalier ne fait en rien disparaitre le tic toc de l’horloge omniprésente de nos vies ?  Dans un sens, être malade offre un avantage certain.  On est bien plus conscient du besoin de vivre chaque instant comme si c’était le dernier.

    Friday 3 February 2012

    Tysabri- Première perfusion: le bilan

    Ça y est! La première étape est derrière moi.  Jeudi matin, je me suis rendue à l’hôpital pour ma première perfusion de TYSABRI.  J’avais énormément d’appréhension, probablement la conséquence directe de recherches trop détaillées sur Google.  Heureusement, mon amie Shannon s’était proposée de m’accompagner tout au long de la journée et de m’assister si besoin, à mon retour à la maison.

    La salle de soin me fait toujours penser à une salle de traite des vaches.  Tous les patients sont alignés de chaque côté de la pièce, branchés à des machines à perfusion.  Chacun s’occupe autant que possible, essayant de transformer ces heures de traitement en espace personnel:  certains lisent, d’autres rédigent des emails, d’autres se ferment complètement à leurs voisins en écoutant leur ipod, les yeux clos.  Je suis de ceux qui dorment, rejettant toute possibilité de rationaliser cette experience assez particulière.  Je plaisante avec les infirmiers pour me distraire de mon angoisse.

    Je ne peux jamais m’empêcher d’observer les autres patients, comme si ils étaient différents de moi, plus malades, souffrant de plus de limitations de mouvements ou de parole…comme si j’essayais de me rassurer que je vais bien parce que je vais mieux qu’eux!

    Une fois la perfusion terminée, on me reprend température, tension, pouls et puis on me garde sous observation pendant une heure.

    La prochaine sera dans quatre semaines, cela pour au minimum deux ans. L'espoir de ne pas aller plus mal n'est pas aussi puissant que celui d'aller mieux ou de guerir, mais il faut se contenter de ce qu'on a. Je croise les doigts pour que ce traitement ne me rende pas plus malade .